Partir à la poursuite du bien être ou du bonheur est déjà en soi une prétention. Chercher la guérison, le paradis, est un orgueil. Ce qui est plus juste et plus grand, je crois, ce n’est pas même de chercher la vérité, c’est ne rien désirer d’autre que d’être l’instrument à travers lequel la nature s’exprime. Ne pas même le désirer d’ailleurs. C’est un abandon total. C’est taire sa propre voix, pour laisser la place à une autre voix qui vient d’un âge plus profond. Parfois, je me rends compte à quel point je ne suis rien, à quel point tout est à la fois dérisoire et beau. Cette pensée me plongeait dans des états de dépression et d’instabilité qui étaient salutaires, finalement. Il faut en passer par là pour finalement comprendre qu’il n’y a rien à comprendre, l’accepter. Il va de soi qu’un mode de vie occidental ordinaire ne permettrait pas ce genre de réflexions, mais je me suis construit, et peut-être aussi ai-je eu de la chance, un petit îlot de solitude, une île sur laquelle je peux penser à l’abri éloigné un tant soit peu du vacarme du monde. Il en existe encore de ces abris, les sirènes du matérialisme n’ont pas encore tout colonisé sur cette terre et même si elles y parvenaient, il resterait toujours quelque part, en nous, solide, en attente, un espace secret, un espace intérieur ancestral dans lequel résonnent, parfois, les voix, les mânes de vitales résonances. Il ne s’agit pas d’un mysticisme new-age ringard, d’illuminations religieuses, ni même de concepts, de théories. Non, rien de tout cela. Il s’agit de quelque chose qui ne demande aucune dénomination, ni description. C’est plus simple qu’un mot ou même qu’une lettre de l’alphabet. C’est quelque chose qui n’a besoin de rien de tout cela pour être justifié.
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