Les bons professeurs de dessin enseignent à domestiquer au mieux le flux des pensées. La main n’est pas loin de jouer le rôle de sismographe, captant et mettant au jour crû les tremblements du dedans et les dialogues intérieurs du type « je sais pas faire les yeux », « je vais foirer la main », se lisent dans le trait et le résultat redouté arrive, effectivement. C’est un élément important à prendre en compte dans le dessin, même au-delà du dessin, dans bien d’autres domaines n’est-ce pas ? C’est certainement la même chose en littérature et plus particulièrement lorsqu’il s’agit de poésie. Les petites voix parasites qu’elles soient négatives ou positives, provoquent des dégâts semblables, tirent le texte-requin hors de l’onde. Quoi, alors ? Taire les voix ? Il n’existe pas de texte sans voix qui le précédent. Croyant sincèrement aux enchantements de toutes natures, il me semble que, dans ce monologue intérieur perpétuel, parmi toutes ces « petites » voix (ce terme « petites » est amusant ici. Ne sont-elles pas au contraire monstrueuses et exténuantes ?) qui nous assiègent, il n’en est qu’une seule qui vaille la peine d’être écoutée. Une voix qui emploierait une langue dénuée de mots sans doute, qui ne dicterait pas mais donnerait matière à créer. Qui se mérite. Il s’agirait dès lors de savoir écouter, avant de savoir écrire. Peut-être.
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