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Je pense aux auteurs passés ou présent que j’aime et me dis qu’il subsiste toujours en eux une quête, une mission mystérieuse d’ordre messianique dans le sens où il s’agit de sauver. Quand il ne s’agit pas de sauver une entité magique obscure, une reine prisonnière, une réalité autre, une mémoire, une langue, un père, une mère, une identité, ça peut-être être, à travers tout ça, plus simplement se sauver soi, son univers intérieur, s’extirper de la mort, de l’inexistence ou de l’oubli. La tentative de sauver de l’extinction, soi-même, un autre, une idée ou un objet, est clairement pour moi une mission d’ordre messianique. Et je ne crois pas qu’il existe une littérature digne de ce nom qui ne sauve pas.

Il y a évidemment le « C’est oracle, ce que je dis » de Rimbaud
La poursuite du moi rêveur, démiurge et cicatrisant de Pessoa. « Car je traverse la vie quotidienne sans lâcher la main de ma nourrice astrale ».
La chasse à la mémoire involontaire de proust. C’est beaucoup plus qu’un souvenir qui surgit, c’est lui-même qui vient au monde (forme de messianisme) et ses univers propres en cohortes.
le messianisme pessimiste, sec voire impossible de beckett. « Attendre godot sans l’attendre »
Baudelaire qui voudrait par sa « sorcellerie évocatoire » rendre vie aux choses déshéritées.
les exemples sont sans nombre vraiment.

A chaque auteur son expérience de l’errance, sa mission mystérieuse…
à chacun sa justification d’une existence boiteuse, sa justification des phénomènes réels mal maîtrisés.
walter benjamin l’explique un million de fois mieux que moi.