Je m’imaginais
sans peine ce rivage
noir intérieur où les
corps nombreux
s’accumulaient si longtemps
après la bataille ordinaire
qu’on se demande encore si
elle n’a jamais eu lieu
ailleurs que dans ma mémoire
Mais il est plus simple
d’avoir mal aux membres
fantômes, les vertèbres grandes
ouvertes, portant un deuil
inconnu. Je porte en effet
le deuil inconnu
des grains de poussière
dans le vent
et quand
fatigué de ces mutilations amères
de ces rideaux fragiles
nombreuses empreintes négligées
du moi de pacotille
laissées sur le sable fin
je décide de passer
les failles inertes, me hisser
par dessus la grille de métal factice
et bleue
tendue vers les étoiles pour
me perdre furieusement
Je retrouve, cassure
dans le sommeil, d’un
coup sec
un rivage entier
découpé dans la pénombre par
la lumière crue du matin
où la camarde elle-même est ravie
de prendre un bain de soleil
elle-même ravie par
la salinité de l’air, l’intégrité
de ces évasions car c’en est une
en effet, de sacrée évasion
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