VI
Le flacon des doux esprits
Doux parfum ancré depuis des millénaires,
Ô, grand génie des catacombes,
Veux-tu bien surgir de ta tombe,
Montre-toi, spectre sinistre et solitaire !
Petit ange éternel aux ailes de gaze,
En silence j’exhume ta passion
Qui exalte mon imagination,
J’aperçois tes volutes avec extase !
Pour percevoir les vapeurs de ton paradis,
Délicatement faut-il extraire le bouchon
Qui t’enferme dans ta petite maison,
Mon doux petit ange esprit.
Plonge ma douleur dans ton nuage gris,
Et de ton corps fébrile en combustion
Embaume ma vaporeuse raison,
Dans tes émanations, mon cœur est saisi !
Il est des parfums anciens comme la cendre,
Doux et strié comme un ciel,
Qui remplissent ces flacons immortels
D’une telle odeur qu’elle sait nous surprendre.
Ainsi, dans un cercueil, sous la terre profonde,
Un corps endormi nous versait son dernier adieu,
De sa substance poudreuse et froide cet être joyeux
Préparait un parfum venu d’un autre monde.
La tombe, sous sa ténébreuse aurore,
Cache en son sein une ultime beauté.
Et aucune n’égale l’indicible volupté
De la douce exhalaison de la mort.
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