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Je ne le regarde pas. J’essaie de le voir. Je parle peu. J’écoute. Non pas les mots qui ne sont que des coquilles vides. J’essaie d’écouter ce que dit l’imperceptible. Ça n’est pas par la pensée que l’on peut lire dans quelqu’un, il faut en quelque sorte le faire entrer en soi par le ventre. C’est par une sensation une introduction que sa nature se révèle. Une personne est un animal une voix un enfant emmitouflé dans l’écorce plus ou moins épaisse.
L’écorce n’a aucune importance elle est à jeter.
C’est lui qui parle, c’est lui qui laisse émerger quelques fines paroles, quelques signes. C’est lui le vivant. L’enrobage c’est le cadavre. La répétition des mêmes folies. C’est ce qu’il force à éclore pour s’harnacher à son monde. Cette force native cet enfant est plus ou moins proche de la surface. Le plus souvent il est enfoui lointain. Il exerce à peine sa magie de vitalité de fluctuations, de pouvoirs d’influences d’échanges sur les cœurs. L’homme ne sait pas qui il habite. Il sent parfois sa voix vivante surgir de façon amoindrie, dénaturée dans les jeux idiots, dans les jouissances de pacotilles dans les lubies ou les ivresses mortes. Les menus plaisirs. De morceaux de pain sur le chemin vers la mort. La mort sans s’être connu sans avoir été entier au moins un instant dans sa nature mystérieuse inconnue familière. Je vois l’homme égrainer les mots que lui dictent le cadavre qu’il porte en lui quelque part dans le cœur. J’essaie de ne pas l’écouter, mais de le sentir le deviner, faire entrer la part sauvage, pas encore dénaturée, tremblante extrêmement craintive, extrêmement faible, affamée vivante pourtant.