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L’essence de la poésie, tout un programme. Que penser ? Que la poésie est le dernier temple vivant de la civilisation occidentale, sa dernière spiritualité, avant la nuit ? La poésie n’a t-elle plus rien à dire ? la poésie, ce mot momie. Mot mie. Comme un genre de fourre-tout. On y met ce qu’on veut dedans : des couchers de soleil, des tirs pleine lucarne de mateudi, des grappes de succédanés quand on veut dire qu’une chose est suffisamment belle, mais quand même un peu mièvre sur les bords. Pas seulement sur les bords d’ailleurs, même au milieu. Poésie est un mot quasiment terminé, fini. Il n’est pas le premier. D’autres sont morts avant lui, c’est comme ça avec les langues vivantes, certains meurent d’autres viennent. On a vu le slam, ce hoquet. Un genre de truc. Cette onomatopée de gifle molle, à confiner dans une bulle. Porter ce mot, comme un drapeau ? Face aux moulins ? Ou bien se ranger du côté des aquoibonistes ? renoncer ? recoudre ? reprendre la marche ? ressasser ? Les poètes jouent dans un stade vide, sous l’œil d’un technicien propreté qui ramasse les papiers gras. La poésie n’est pas morte peut-être, mais les poètes le sont c’est sûr. Après tout, peut-être que la poésie n’a pas besoin de nous pour exister, ou peut-être que la vie serait meilleure avec elle. Peut-être s’agit t-il d’un problème de structuration des cerveaux. Les cerveaux contemporains ne sont plus formatés pour accueillir ce truc qu’on nomme poésie. C’est physique. on n’abreuve pas les êtres qui n’ont pas soif.